Matins de guerre

Il y a des matins où tu pars à l'école comme à la guerre. Parce que l'équipe-école s'est tannée, parce qu'elle a élaboré un plan pour t'aider à venir à bout du p'tit loup de 8 ans, celui-là même qui te fait tous les temps et qui te fait pleurer comme si tu avais 4 ans. Ces matins-là, tu penses à l'examen de sciences que tu devras lui donner, à la secrétaire qu'il faudra appeler, car il risque fort de s'énerver, à la figure d'autorité qui viendra le chercher, à la prof qui l'accueillera pour le reste de la journée et à la directrice qui l'attend déjà dans son bureau pour le rencontrer. Ces matins-là, il ne te vient pas à l'idée qu'il pourra plutôt décider d'être un ange, mieux encore, qu'il aura envie de jaser d'art avec toi lors du projet de création d'une maison hantée à la manière de Vincent Van Gogh:

- Moi, je l'aime, son autoportrait, Mme Marie-Andrée, parce qu'il a fait un beau fond. On dirait de l'art abstrait comme tu nous as montré. - .... - Pis j'avais une question pertinente aussi: est-ce qu'il a fait des paysages de Noël dans sa vie? - ...

Ces matins-là, tu perds tes moyens et tu réponds drôlement aux autres questions des élèves:

- Mais là, yé-tu mort, Vincent Van Gogh? - Oui, il est mort aujourd'hui.

Alors, tu sèmes (encore) la zizanie :

- AUJOURD'HUI?!

Puis, tu rencontres ta directrice sur l'heure du dîner et tu lui dis, mi-rêveuse mi-sceptique, que tout va bien. Alors, elle s'inquiète et elle te prend par la main, t'entraine vers la porte des toilettes:

- Touche du bois. Tiens, je vais même en toucher avec toi.

Parce qu'il faut croire qu'il y aura d'autres matins de guerre... et d'autres journées magiques. ;)